J’ai lu pour vous ce magnifique récit de Jean-Marie Le Méné, ancien officier dans la Marine Nationale française, ayant effectué plusieurs campagnes à bord de la Jeanne d’Arc, comme la héroïne de ce histoire de vie véridique, celle de Marine Bayer. Publié aux Editions du Rocher.
Avec une détermination sans pareil depuis l’adolescence, Marine va passer son brevet de pilote à 15 ans puis franchir les étapes la menant aux missions aéroportées les plus dangereuses en hélicoptère, dont sa dernière mission de libération du voilier Le Ponant aux mains de pirates somaliens puis de capture des pirates et de récupération d’une partie de la rançon versée par le gouvernement français.
Première femme à commander une escadrille d’hélicoptères aéroportés, certaines portes ne lui seront cependant pas ouvertes du fait de son sexe féminin: à deux reprises, elle tente d’intégrer le cursus de spécialisation de pilote de chasse et se le voit refuser. Trop vieille, pas issue du saint des saints : l’Ecole Navale, et enfin pour couronner le tout, une réputation de féministe (non méritée car elle avait fait l’objet de harcèlement par son supérieur lors d’une mission embarquée).
La chute du récit est poignante car, mère de trois enfants conçus lors des rares moments de vie commune avec son mari, pilote de chasse, elle jonglera en permanence entre ses missions lointaines et embarquées (des mois en mer, parfois sans contact avec le monde extérieur) et son désir sincère d’être une bonne mère. Ce grand écart permanent entre sa motivation qui lui fait accepter des missions l’éloignant à nouveau de son mari et de sa famille et son envie viscérale d’être avec ses petits la mènera au divorce. Et après son divorce, à la prise de conscience essentielle : celle du sens de sa vie de mère. Après sa dernière mission somalienne, elle quittera donc la Marine et mettra ses talents de pilote au service de son nouveau métier d’infirmière dans les régions isolées du Pacifique Sud, accessibles en cas d’urgences médicales uniquement par la voie des airs.
L’épilogue de l’auteur me semble plein de bon sens et de leçons à en tirer:
En effet, l’auteur compare Marine à Ulysse dont le désir de la mer l’a emporté sur le désir du port.
Marine semble une femme accomplie, très respectée pour ses qualités professionnelles et de bienveillance pour ses équipes, bonne mère, pleine de bon sens et de liberté intérieure, et pourtant… Pourquoi le bonheur et l’équilibre de vie ne sont-ils venus qu’après l’épreuve de la rupture? Marine aurait-elle tardé à revenir au port, ainsi qu’Ulysse? Pourquoi a-t-il fallu un divorce pour que la méthode soit remise en cause, au profit d’un nouvel et meilleur équilibre familial?
J’avoue être personnellement attristée par cette belle histoire car, aimant les histoires d’amour qui finissent bien, j’espérais depuis le début du livre que le couple tiendrait et que ce premier amour ferait mentir tous les pronostics habituels que l’on sentait dès les premières pages: les risques inhérents à l’absence, au manque de communication et de vie commune de ce couple, tout simplement. Une femme extraordinaire à qui il est arrivé un échec ordinaire, somme toute.
Puissions-nous toutes en tirer les leçons et chérir au quotidien ceux qui nous entourent en leur consacrant temps et affection malgré les contraintes nombreuses de nos vies professionnelles !